Le Livre de Marie
BNF NAF 16251
La Folie du Diable
le Sponsus (l’Epoux) -BNF Lat 1139
le Roman de Fauvel -Gervais du Bus : -BNF Fr 146
l’Ordo virtutum (le Jeu des vertus) extraits - Hildegard
Jubilatio - Patrick Burgan
Angelica Greuter - Sarah Richards : sopranos
Laurence Esquieu : mezzo - Catherine Ravenne : contralto
Erwan Picquet : baryton - Francisco Mañalich : ténor - vièle
La tension entre le bien et le mal, le combat des vertus contre les vices, voici des thèmes depuis toujours omniprésents dans les préoccupations philosophiques et religieuses de l’homme qui aspire à l’ordre et au bonheur. Ainsi la plupart des religions ont intégré des dieux mauvais incarnant le mal.
Satan, le Diable (diabolos en grec, Šayṭān en arabe) est bien connu : dans l’Occident chrétien Lucifer est un ange déchu qui a commis le péché de vouloir surpasser Dieu. Perverti dans sa rébellion, Satan va s’efforcer de tenter les humains pour les entraîner dans sa chute. Après avoir réussi à tenter Eve et Adam, il a même essayé de tenter le Christ !
Au Moyen Âge Adam et Eve sont constamment évoqués comme les personnages ayant précipité la chute de l’homme dans le péché. La femme en particulier a porté à la suite d’Eve la responsabilité de tous les malheurs du monde, accusée d’impureté et de souillure, ainsi des milliers de sorcières ont été brûlées par l’Inquisition.
La dualité bien/mal est éternelle et sans réelle résolution, l’histoire le prouve. Tantôt le bien l’emportera mais le mal est toujours en embuscade et le combat n’est jamais gagné.
La Folie du Diable représentera cette infernale alternance au travers de
3 œuvres médiévales très différentes mais toujours convergentes, dans
un montage où les extraits sont imbriqués, se répondant les uns aux autres.
Les antiennes Sed Diabolus, Cum erubuerint, O frondens virga de Hildegard von Bingen expriment tout à la fois d’une part l’aspiration de l’homme vers le bien et la lumière, d’autre part sa tendance à retomber dans le mal et la misère. O frondens virga, prière intense vers plus de pureté, a inspiré à Patrick Burgan la création Jubilatio.
Le Sponsus, ou Jeu des Vierges sages et Vierges folles (12e siècle), se réfère à la parabole de St Matthieu basée elle-même sur l’ancienne coutume qui voulait que la jeune mariée aille vers son époux avec une lampe allumée.
Ici les vierges folles ont eu le malheur de s’endormir et sont dans l’impossibilité de rallumer leurs lampes contrairement aux vierges sages ; pour leur manque de vigilance l’époux-Christ les envoie directement en enfer. Le langage employé est soit le latin, soit un « parlange » du 11e siècle qui mélange la langue d’oc et le patois charentais. Il faut noter dans cette histoire l’importance de la lumière, symbole de vérité et d’intelligence, en opposition avec les ténèbres et le feu de l’enfer.
Le Roman de Fauvel, daté du 14e siècle, n’est pas une œuvre liturgique mais une violente satire politique contre la corruption des grands de ce monde et en particulier du clergé de l’époque. En effet il ne faut pas oublier que l’Église à cette lointaine époque était intimement liée au pouvoir politique, avec tous les vices que cela a pu entraîner. Chants monodiques et motets alternent pour dénoncer et décrire tous les vices, jusqu’à l’épisode du « charivari », scène de grand désordre, mais qui se terminera par le combat victorieux des vertus contre les vices, avec l’éloge de la chasteté et une évocation des vierges sages.
L’Ordo virtutum, autre jeu liturgique du 12e siècle, nous présente une pauvre âme égarée ; les vertus viennent pour la secourir et vont s’attaquer au Diable en personne. La musique de Hildegard, toujours très inspirée, nous emmène dans les tréfonds de l’âme humaine.
Le spectacle, constamment dans la dualité, évoluera inéluctablement vers un dernier point d’interrogation…
Spectacle créé en juin 2013 au prieuré de Rauzet (Charente) dans une version mise en scène par Daniel Esteve, avec l'aide financière du conseil Général de la Charente, de la Région Poitou-Charentes, de l'Adami et de la Spedidam.
